Moyen-Age
Publié le 12/12/2008 à 12:00 par geneapope
Dans le cadre du siège d'Orléans - 12/10/1428-07/05/1429.
La bataille des Harengs - 13/02/1429 - Rouvray-Saint-Denis.
Capitaines anglais et anglo-normands ayant participé à l'escorte du convoi, et à la bataille en question.
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Les troupes anglo-normandes assiégeaient la ville d'Orléans depuis la mi-octobre 1428.
Thomas Montagu, comte de Salisbury, chef suprême de l'armée anglaise, avant qu'il ne soit tué à la bastide du pont d'Orléans (les Tourelles), avait laissé des garnisons dans les principales villes de la Beauce.
Il fallait fréquemment ravitailler les hommes stationnés au siège, en vivres, armes, munitions et denrées diverses, et aussi l'argent pour les soldes. Ce n'était pas une mince affaire, et cela nécessitait une importante organisation et une forte logistique pour mener à bien ces ravitaillements.
On formait des convois à partir de Paris, et les habitants de cette ville durent souvent se serrer la ceinture pour fournir des marchandises en quantité, qui prendraient le chemin d'Orléans.
Une kyrielle de chariots traversaient la Beauce, tirés par des boeufs, remplis des produits et fournitures nécessaires : nourriture et ravitaillement divers, vin, boulets, poudres, traits, flèches... et aussi des porcs et des moutons qui suivaient tant bien que mal les véhicules.
C'étaient 5 ou 600 chariots, lourdement chargés, qui défilaient l'un derrière l'autre, à petite vitesse, s'étirant sur des centaines de mètres, roulant sur des chemins la plupart du temps en mauvais état, et qui mettaient plusieurs jours pour franchir la distance entre Paris et Orléans.
Les troupes françaises et les défenseurs d'Orléans avaient le même souci d'assurer le ravitaillement des défenseurs et des bourgeois de la ville.
Le mardi 25 janvier 1429, par la Loire, plusieurs barques de vivres étaient sur le point d'entrer dans la ville d'Orléans, lorsque les habitants du villege de Sandillon (rive gauche, côté Sologne, et en amont) en avertissent "Glacidas" (W. Glasdale, écuyer, bailli d'Alençon pour les anglais, et que Jehanne la Pucelle nommait ainsi), officier anglais, qui envoya alors des troupes au port de Saint-Loup, qui était alors de ce côté du fleuve, pour s'opposer à leur passage.
Les Orléanais s'étant portés en avant, se firent transporter sur une île qui en était voisine, mais ils donnèrent malheureusement dans une embuscade, et furent obligés de battre en retraite, abandonnant les vivres aux Anglais, qui s'en emparèrent et en prirent possession, en partageant avec les habitants de Sandillon qui les avaient avertis.
Grosse déception et rancoeur des assiégés qui rentrèrent bredouilles dans la ville ayant subi de plein fouet cette "déculottée" par les anglais, sans compter quelques pertes d'hommes et de nombreux blessés.
Environ deux semaines plus tard, les français ont vent qu'un convoi de vivres destiné aux anglais va partir de Paris, et, pour se venger, décident d'aller à sa rencontre et de l'attaquer.
Partant d'Orléans, des troupes prennent la route pour intercepter de convoi. Le combat eut lieu le dimanche 13 février 1429, tout près du village de Rouvray-en-Beauce (aujourd'hui Rouvray-Saint-Denis, au nord d'Orléans), qu'on appela "la Bataille des Harengs" ou "la journée des Harengs", parce que beaucoup de ces chariots étaient chargés de harengs séchés, destinés aux soldats durant le Carême, et que de nombreux barils contenant cette sorte de poisson séché avaient été éventrés durant les assauts.
De nombreux chroniqueurs ont raconté cette bataille. A Rouvray-Saint-Denis, encore de nos jours, un panneau en plein champs, portant l'inscription "Le Camp Ennemi", rappelle l'endroit où se déroula le combat, et il existe une mare, dite "La Mare aux Boeufs", où paraît-il les Anglais firent boire leurs bêtes.
Une plaque dans l'église du village conserve et perpétue le souvenir de cet évènement.
Les français furent battus à plate-couture, et beaucoup de seigneurs et de soldats y furent tués et d'autres blessés. Parmi les blessés figurait Jehan d'Orléans, le fameux Dunois, "Bastard" d'Orléans.
Mortification pour les assiégés d'Orléans encore exacerbée, quelques jours plus tard, le 17 février, lorsque le convoi atteignit enfin la cité.
En effet, des soldats anglais qui avaient participé à l'escorte du convoi, se portèrent devant les remparts de la ville pour narguer les français, en criant :
"Ah ! mes harengs, mes biaux, mes biaux harengs ! Les Orléanais leur répondirent par quelques coups de canon qui en tuèrent plusieurs et firent taire les autres.
L'ESCORTE DU CONVOI ANGLAIS.
Bien évidemment, un convoi de cette taille devait être escorté militairement, tout au long de son transit, pour le protéger de toute attaque éventuelle.
L'étude des revues des troupes (on disait des "monstres" = montres) anglo-normandes de cette période, nous permet d'évaluer quelque peu le nombre et la composition des troupes de l'escorte.
Des revues eurent lieu à Corbeil, les 7, 8, 9 et 11 février 1429; les détachements rejoignirent ensuite le convoi, qui dût partir de Paris le 10 ou le 11, pour l'accompagner dans son voyage.
Chaque détachement, passé en revue par deux ou trois "commissaires de montre", recevait sa solde dont la quittance était signée le lendemain ou le surlendemain, et attendait son ordre de départ.
Tentons de détailler un peu ces détachements de troupes.
7 février 1429 :
Détachement n° 1.
Troupe de
Nicole BOURDET - chevalier bachelier, conduite par le capitaine lui-même.
26 hommes d'armes et 82 archers, ce qui fait, avec le capitaine : 109 hommes.
Passés en revue par les commissaires Guy Bouteillier, chevalier, et Guillaume Brounyng, secrétaire du roi (anglais).
Quittance à Paris, le 08/02/1429, pour 819 livres 7 sols 6 deniers tournois.
Ces hommes devaient sans doute venir de Carentan et de Lisieux, villes dont Nicole Bourdet était le capitaine. La solde ci-dessus était versée pour un mois, dans le cadre du second mois de la "retenue" (contrat d'engagement) de ce capitaine.
Nicole Bourdet et ces hommes ne durent séjourner que quelques jours sur les lieux du siège, et remonter sur Paris ou sur Chartres après cette mission d'escorte. On ne connaît pas d'autre retenue de ce chevalier sous les murs d'Orléans, et il ne participe sans doute pas aux évènements d'Orléans.
Détachement n° 2.
Troupe de
Jehan DAUNOU - écuyer, conduite par le capitaine lui-même.
4 hommes d'armes et 2 archers, ce qui fait, avec le capitaine : 7 hommes.
Passés en revue par les commissaires Guy Bouteillier, chevalier, seigneur de la Rocheguyon, et Guillaume "Brouning", secrétaire du roi.
Quittance à Paris, le 08/02/1429, pour 83 livres 19 sols 2 deniers tournois.
On ne sait pas avec précision de quelles villes de Normandie venaient ces hommes.
La solde ci-dessus est payée pour un mois, du 07/02 au 06/03/1429, dans le cadre d'une endenture (un contrat d'engagement signé avec le roi ou son représentant) du 20/01/1429, prévue pour lui, 4 hommes d'armes et 10 archers et arbalétriers à cheval (il est rare que des arbalétriers soient signalés dans les revues anglaises, car on utilisait en majorité des archers).
C'est donc seulement une partie qui participe à cette escorte, les 8 archers ou arbalétriers qui manquent se trouvent probablement en garnison quelque part, à moins qu'ils n'aient été requis pour suivre le Régent anglais Bedford.
Jehan Daunou ne participa sans doute pas directement au siège, à Orléans. Il fut plus tard retenu pour une autre mission de "conduicte des vivres" de 24 jours, du 7 mars à la fin mars, avec 4 hommes d'armes et 3 archers qu'il "montra" à Paris le 12 mars.
Détachement n° 3.
Troupe de
Clément OUVERTON - écuyer, conduite par William BATAILLE, écuyer, "homme d'armes et conduiseur desdictes gens."
W. Bataille, avec un autre homme d'armes et 5 archers, soit : 7 hommes.
Passés en revue par Guillaume Mineurs, écuyer, capitaine de Harfleur, et Guillaume Brounyng, secrétaire du roi, commissaires.
Quittance à Paris, le 08/02/1429, de W. Bataille, pour 54 livres 11 sols 8 deniers tournois.
Ces hommes venaient de Montivilliers, dont C. Ouverton était le capitaine. La solde ci-dessus est pour un mois (février 1429) pour service "audit conduict des vivres et sur les champs."
Clément Ouverton avait reçu une endenture, datée de Chartres le 12/01/1429, pour 2 hommes d'armes, lui compris, et 6 archers à cheval, soit 8 hommes, qui suivait une autre endenture pour deux mois auparavant.
On a une revue à Chartres, le 12 janvier 1429, pour lui, 1 homme d'armes et 6 archers, et la quittance pour 13 jours, du 18 janvier à la fin du mois. Il semble qu'il se trouva donc à Chartres avec cet autre détachement.
Mais, pour cette mission d'escorte, il ne figure pas avec ses hommes, laissant son lieutenant W. Bataille mener le détachement. Il ne semble pas qu'il ait reçu d'autres retenues pour les évènements du siège d'Orléans.
Détachement n° 4.
Troupe de
Jehan SALVAIN - chevalier bachelier, bailli de Rouen et capitaine de Dieppe, conduite par Henri GREGORI, écuyer.
Henri Grégori, avec 14 hommes d'armes et 32 archers, soit : 47 hommes.
Passés en revue par Jehan de Saint-Yon, écuyer, et Robert COTTES, aussi écuyer, commissaires.
Quittance
"pour ce ycy, de Henri Grégori, escuier, chief de monstre et conduiseur desdictes 15 lances et archiers," faite à Paris, le 08/02/1429, pour 381 livres 17 sols 6 deniers tournois,
... et le surplus des gens de sadicte retenue estoit audit siège devant Orliens, où ilz ont ou doivent avoir esté paiés par ledit trésorier des guerres pour ledit moys."
Ces hommes, venus surtout de Rouen, faisaient partie d'une endenture (datée de Chartres le 15/12/1428) pour 21 hommes d'armes, le capitaine compris, et 63 archers. Une partie fut requise pour cette mission, sous les ordres du lieutenant Grégori, le reste de la troupe séjournant au siège, sous les ordres d'un autres lieutenant, George Snylinkton. Sans doute, après l'accompagnement du convoi jusqu'à Orléans, les hommes de H. Grégori restèrent-ils au siège avec le reste de la troupe, complétant ainsi l'endenture.
En avril 1429, d'autres hommes de Jehan Salvain, provenant de la garnison de Rouen, seront requis pour une autre mission d'escorte de convois de vivres, pour 15 jours, à partir du 04/04/1429.
Jehan Salvain ne vint pas au siège en personne. Il fut le bailli de Rouen qui fit mener Jehanne la Pucelle à l'échafaud, le 31 mai 1431, pour son supplice.
Détachement n° 5.
Troupe de
Robert HERLING - chevalier bachelier, conduite par le capitaine lui-même.
R. Herling, avec un autre homme d'armes et 6 archers, soit : 8 hommes.
Passés en revue par Thomas de Courcelles, chevalier, conseiller du roi, et Guillaume "Brouning", secrétaire du roi, et Guillaume Mineurs, écuyer, capitaine de Harfleur.
Quittance à Paris, le 08/02/1429, pour 69 livres 11 sols 8 deniers tournois.
Robert Herling, en 1429, était capitaine de Meulan, Poissy, Montjoie et Saint-Germain. On ne sait pas de laquelle ou desquelles de ces villes provenaient ces hommes.
La solde ci-dessus est payée pour le mois de février 1429. Auparavant, ce capitaine avait été retenu pour deux mois, avec la même troupe, et il est à Chartres le 14 janvier 1429, où il fait une revue, avec quittance le même jour, pour une solde de 16 jours, du 15 au 31/01/1429.
Sans doute participa-t-il à la "pacification" de la Beauce, à partir de Chartres, durant quelques temps. Il ne semble pas qu'il reçut d'autres missions dans le cadre du siège, du moins sur Orléans ou les villes de la Loire.
Détachement n° 6.
Troupe de
Raoul de NEUFVILLE, (Ralph NEVIL) - chevalier bachelier, comte de Westmoreland, conduite par le capitaine lui-même.
R. Neufville, avec 13 hommes d'armes et 41 archers, soit : 55 hommes.
Passés en revue par Guy Bouteillier, chevalier, et Guillaume Brounyng, secrétaire du roi.
Quittance à Paris, le 08/02/1429, pour 422 livres 1 sol 8 deniers tournois.
Solde versée pour le second mois, dans le cadre d'une endenture reçue à Chartres le 12/01/1429.
Le premier mois (03/01 au 02/02/1429) avait été utilisé également pour des escortes de convois de vivres.
Il recevra d'autres endentures pour ce type de missions, et d'autres, mais ne participe pas directement aux évènements du siège lui-même.
Seigneur Anglais, il était déjà en France en mars 1418, où le roi Henry lui donne, en Normandie, les biens de Guillaume de Molyns et de Robert de Fréville, à la charge de la redevance d'une lance, à Bayeux !
En 1449, capitaine de Carentan, lors de la reconquête de la Normandie par les troupes de Charles VII, il se rend aux troupes de François de Bretagne.
Les chroniques du temps précisent ainsi la reddition de la ville de Carentan :
"En après, alla l'avant-garde du duc (François de Bretagne, neveu de Charles VII)
devant la ville et le château de Carentan, auquel lieu les suivirent la bataille (le corps principal de l'armée)
et l'arrière-garde; et les approchèrent de si près, que force fut aux Anglois qui étaient dedans de se rendre et de s'en aller le bâton au poing !
De cette place était capitaine pour le roi d'Angleterre, messire Raoul de Neufville, au lieu duquel furent commis, pour la garde d'icelles ville et forteresse, Olivier de Bron et Jehan de Rossigni-Vimeu."
(Mathieu de Coucy, "Chroniques", ch. XXV)
Détachement n° 7.
Troupe de
Guy BOUTEILLIER - chevalier, seigneur de la Roche-Guyon, maître d'hôtel du Régent.
3 hommes d'armes, dont un "conduiseur", et 29 archers, soit : 32 hommes.
Passés en revue par Jehan de Saint-Yon et Robert Cottes, écuyers, commissaires.
Quittance à Paris, le 08/02/1429, pour 189 livres 7 sols 6 deniers tournois.
Cette solde est pour un mois, du 03/02 au 02/03/1429, pour leur "service au conduict des vivres."
Guy Bouteillier avait été nommé en 1428 "capitaine de 150 lances de la garde du Régent". Il reçut diverses autres endentures, et lui et ses troupes participèrent aux escortes du Régent Anglais, le duc de Bedford, pour ses déplacements, ainsi que pour des escortes de convois de vivres. Il était aussi, à l'occasion, commissaire de montre.
Certains de ses hommes (une quinzaine) furent stationnés au siège, durant au moins deux mois (du 03/02 au 02/04/1429). Encore un exemple de seigneur français, rallié aux Anglais, et en recevant, outre des marques de confiance du Régent, des terres et des honneurs.
Détachement n° 8.
Troupe de
Thomas RAMPSTON - chevalier banneret, capitaine d'Argentan, chambellan du Régent.
13 hommes d'armes, dont un "conduiseur", et 31 archers, soit : 44 hommes.
Passés en revue devant Jehan de Courcelles, chevalier, conseiller du roi, Guillaume Mineurs et Guillaume Brounyng, commissaires généraux.
Quittance, le 08/02/1429, pour 173 livres 12 sols 11 deniers tournois.
Retenu pour 15 jours, à compter du 01/02/1429, "pour service au conduict des vivres d'icelui siège", cette troupe fut prolongée, à la même date de revue (07/02/1429), pour 15 autres jours, jusqu'à la fin février. (Ces quinze autres jours furent payés, pour la même somme, avec quittance seulement au 12 mars).
Ces hommes venaient d'Argentan.
Cette troupe faisait partie d'une endenture avec le Régent, en date du 12/01/1429, prévue au total pour 15 hommes d'armes, lui non compris, et 45 archers.
De la garnison d'Argentan furent extraits 3 archers, conduits par lui-même, pour participer surtout à l'escorte du Régent Bedford, et ceci du 15/11/1428 au 14/05/1429.
Thomas Rampson laissa une bonne partie de ses hommes à l'un de ses lieutenants, Jehan Affourde, qui fait montre au siège même, le 23/04/1429, de 23 lances et 45 archers.
Ce capitaine anglais est l'un des rares chevaliers "bannerets" ayant participé aux évènements du siège d'Orléans.
8 février 1429.
Détachement n° 9.
Troupe de
Richart WIDEVILLE - écuyer, capitaine de Caen, conduite par Thomas KIRTON, écuyer.
Thomas Kirton, avec 2 autres hommes d'armes et 8 archers, soit : 11 hommes.
Passés en revue "pardevant lesdiz commissaires" (probablement G. Mineurs et G. Brounyng).
Quittance "dudit Kirton", à Paris, pour 84 livres 7 sols 6 deniers tournois.
Cette solde représente un troisième mois, à compter du 25/01/1429, pour "service au conduict des vivres dudit siège", dans le cadre d'une endenture, signée le 15/12/1428, mais rétrospectivement, car la date de début est le 25/11/1428.
Cette troupe fut retenue pour un 4ème mois.
Il s'agit là d'une troupe spécialement levée pour ces missions, et non d'une fraction de la garnison de Caen. Ces hommes ne semblent pas avoir participé directement au siège.
Richart Wideville aura une autre endenture, avec un nombre d'hommes d'armes qui n'est pas connu (sans doute 5 ou 6) et 15 archers à cheval.
Détachement n° 10.
Troupe de
Jehan FASTOLF - chevalier, grand maître d'hôtel du Régent, capitaine de Honfleur et d'Alençon.
Ce détachement était mené par l'un de ses lieutenants dont nous n'avons pas le nom.
39 hommes d'armes et 106 archers, soit : 145 hommes (troupe importante).
Passés en revue "pardevant lesdiz commissaires" (probablement G. Mineurs et G. Brounyng).
Jehan Fastolf signera à Paris, le 12/03/1429, une quittance globale pour ce détachement et pour le n° 11 qui suit.
Il est possible que ces hommes étaient des Anglais d'Angleterre.
Ce chevalier fut présent au siège, où il sera souvent cité. Au mois de juillet 1428 il avait reçu une endenture pour 20 hommes d'armes et 60 archers, "joings à l'armée par luy (Salisbury) derrenièrement amenée d'Angleterre pour servir le Roy et mondit seigneur le Régent à la conqueste sur la rivière de Loyre et païz d'Orléanois", pour 4 mois, prolongée ensuite pour deux autres mois, et se terminant le 22/01/1429. C'est Robert Bryde, l'un de ses lieutenants, qui conduisait cette troupe, Fastolf passant beaucoup de temps à suivre le Régent.
Le 12/01/1429, nouvelle endenture pour 50 hommes d'armes, lui non compris, et 150 archers. C'est en grande partie cette troupe qui composera les détachements n° 10 et 11.
Des hommes de ces garnisons de Honfleur et d'Alençon (une quinzaine) seront aussi requis pour participer au siège et aux escortes des convois de vivres.
9 février 1429.
Détachement n° 11.
Troupe de
Jehan FASTOLF - chevalier (voir détachement n° 10)
Deux petites unités :
- 6 hommes d'armes et 8 archers, soit : 14 hommes,
- 4 hommes d'armes et 9 archers, soit : 13 hommes,
donc 27 hommes, passés en revue "pardevant lesdiz commissaires (probablement G. Mineurs et G. Brounyng), pour le mois de février 1429, pour leur service "au conduict des vivres d'icelui siège d'Orliens et tenir les champs."
Les détachements n° 10 et n° 11 représentaient donc 49 hommes d'armes et 123 archers, soit au total 172 hommes, pour lesquels Fastolf signera à Paris, le 12/03/1429, une quittance globale pour 1.349 livres 15 sols 10 deniers tournois.
11 février 1429.
Détachement n° 12.
Troupe de
Hue de PREZ - écuyer, bailli de Chartres, conduite par le capitaine lui-même.
C'est un capitaine français passé du côté des anglais.
Hue de Prez, avec 9 hommes d'armes et 20 archers, soit : 30 hommes.
Passés en revue par J. Fastolf et Guillaume Mineurs.
La quittance ne sera signée que le 10/03/1429, pour 247 livres 18 sols 4 deniers tournois.
Cette somme (à 100 sols tournois - soit 5 livres - "pour chascun archier le moys") représente la solde pour le mois de février 1429, dans le cadre d'une endenture signée le 15/12/1428 à Chartres.
Ces gens venaient de Chartres, dont H. de Prez était le capitaine. Partis de cette ville, ils cheminèrent à travers la Beauce, pour rejoindre le convoi avant le village de Rouvray.
Ce capitaine reçut une autre endenture, outre celle-ci, avec un nombre d'hommes identique, qui participa aux évènements du siège.
Pour l'anecdote, au sujet de cette seconde troupe, un incident nous montre combien l'armée anglaise était organisée et tatillonne quant à l'équipement des troupes.
Une revue eut lieu au siège le 02/01/1429, par Guillaume Glasdall. Sur cette troupe, on retient sur la solde une somme, en tant que pénalité, pour un mauvais équipement de trois hommes à qui il manquait le casque :
"Quictance à Chartres, le 13 janvier 1429, montans 242 livres 18 solz 4 deniers tournois, en laquelle somme sont comprins 60 solz tournois qui rabatuz ont esté par ledit receveur général pour trois desdiz hommes d'armes, défaillans à la dicte monstre de bacinet ou salade à visière (casques)
comme par ladite monstre appert, pour chascun d'eulx 20 solz tournois par moys dont ledit receveur fait recepte..."
Ces trois soldats ont dû ressasser leur rancoeur, quand ils perçurent leur solde amputée de 20% !
Cet ensemble représente donc 522 hommes, qui forment l'escorte militaire du convoi. Sans doute y avait-il quelques autres petites troupes qui ne sont pas signalées ici.
Accompagnaient généralement les troupes "sur les champs", des pages, des coutilliers (armuriers, valets d'armes), des hommes de pied et accompagnateurs divers, auxquels il y a lieu d'ajouter les charretiers, les portefaix et autres.
On peut donc sans doute multiplier par quatre le nombre ci-dessus, ce qui porterait à plus de 2.000 le nombre total d'hommes formant l'escorte de ce convoi de ravitaillement.
La bataille tournant à l'avantage des Anglais, le convoi put arriver à Orléans pour ravitailler les assiégeants.
Sources :
- Comptes de la ville.
- Bull. SAHO, médiathèque Orléans.
Publié le 12/12/2008 à 12:00 par geneapope
L'armée anglaise était très organisée. Elle recrutait les troupes par une
endenture, contrat d'engagement où était précisé le nombre d'hommes et la durée; les effectifs étaient contrôlés régulièrement par des
montres, revues militaires, ce qui donnait lieu au paiement de la solde, constaté par une
quittance, que signait le capitaine ou son représentant.
Voici transcription de quelques documents :
Exemple de quittance de solde :
"Saichent tuit que je, Guillaume Glasdall, escuier, bailly d'Alençon et cappitaine de 30 lances et les archiers, du nombre des 400 lances de nouvel retenus par Mons. le Régent de France, duc de Bedfort, pour estre avec luy et servir le Roy nostres. au siège devant Orliens et ailleurs où il luy plaira.
Confessons avoir eu et receu de Pierre Surreau, receveur général de Normendie, la somme de huit cent quarente-trois livres quinze solz tournois en prest et paiement des gaiges et regars de moy, 29 aultres hommes d'armes et 80 archiers à cheval, de madicte retenue, pour leur service d'ung moys à la bastide et tour du bout du pont d'Orliens, pour ung moys commençans le 19è jour de novembre derrenier passé, et dont j'ay faict monstres aujourduy, à la dicte bastide, pardevant Thomas Dirthile et Richart Fortescu, escuiers, à ce commis par mess. de Suffork, de Talbot et d'Escalles. (*)
Et paiemens à moy faict, par vertu des lectres du Roy, nostre seigneur, données à Chartres, le ... (?) jour dudit moys de novembre.
De laquelle somme de 843 livres 15 solz tournois dessus dicte je me tiens pour contens et bien paié, et en quicte le Roy nostres., ledit receveur général et tous aultres.
En temoing de ce, j'ay scellé ceste présente quictance de mon seel, à la dicte bastide, le second jour de décembre l'an 1428."
(*)Tous les trois, lieutenants du roi, étaient les chefs du siège après la mort de Salisbury.
(British Museum, add. ch. n° 3636)
Exemple de pénalité infligée pour mauvais équipement :
Suite à une montre de la troupe de Hue de Prez, bailli de Chartres, le 02/01/1429, pour 10 hommes d'armes, lui non compris, et 20 archers. (Hue de Prez était un français passé chez les anglais.)
Sur cette troupe, on retient sur la solde une somme, en tant que pénalité, pour un mauvais équipement de 3 hommes d'armes à qui il manque le casque.
"Quictance à Chartres, le 13 janvier 1429, montant 232 livres 18 sols 4 deniers tournois, en laquelle somme sont compris 60 sols tournois (3 livres) qui rabatuz ont esté par ledit receveur général pour trois desdiz hommes d'armes défaillans à ladicte monstre de bacinet ou salade à visière, comme par ladite monstre appert, pour chascun d'eulx 20 sols tournois par moys dont ledit receveur faict recepte..."
Ampliation d'une endenture :
Ampliation d'une endenture pour la troupe de Thomas Giffart, écuyer, bailli de Mantes, pour 12 hommes d'armes, lui compris, et 36 archers.
Chartres, le 23 décembre 1428.
Destinée aux agents des finances.
"Jehan, Régent le royaume de France, duc de Bedford, à noz très chiers et bien amés les trésoriers et généraux gouverneurs des finances de monseigneur le Roy, tant en France, comme en Normendie; salut et dilection.
Comme de nouvel, nous, pour et au nom de mondit seigneur le Roy, ayons retenu et ordonné nostre chier et bien amé Thomas Giffart, escuier, à la charge de douze hommes d'armes, sa personne en ce comprise, et de trente-six archiers, montez, armez et arrayez (1) souffisamment, pour iceulx conduire et emploier bien et deuement ou service de mondits. et au nôtre, au siège devant Orliens, et par tout ailleurs où il nous plaira ordonner, durant ledit siège d'Orliens.
Pour lesquels hommes d'armes et archiers de sa retenue, il aura et prandra gaiges, c'est assavoir :
- pour hommes d'armes, 12 deniers esterlins le jour, monnoye d'Angleterre, avec regars acoustumez,
- et pour chascun archier, six deniers d'esterlins le jour, d'icelle monnoye, ou aultre monnoye coursable à la valeur, en la manière acoustumée. (2)
Dont paiemens luy sera faict, de moys en moys, après qu'il aura faict ses premières monstres, et selon icelles durant led. siège, des finances du païs de France, ou du duchié de Normendie; iceulx gaiges et regars commençans landemain que le terme des endentures ou payement darrenier d'icelui escuier sera faict, expiré et failli; comme par endenture sur ce faictes entre nous et ledit escuier, ces choses et aultres pèvent plus applain apparoir.
Nous vous mandons et enjoignons expressément, de par mondits. le Roy et nous, que par Andry d'Espernon, trésorier des guerres dud. païs de France, ou par Pierre Surreau, receveur général dudit duchié de Normendie, vous, des deniers de sa recepte, faictes payer, bailler et délivrer aud. escuier, ou à son certain commandement, les gaiges et regars desdiz hommes d'armes et archiers de sa retenue, de moys en moys, selon leurs monstres ou reveues, durant led. siège; tout ainsi et par la fourme et manière que dessus est dit.
Et par rapportant ces présentes, que voulons estre garant pour vous et led. trésorier des guerres ou led. receveur général, avec monstres ou reveues sur ce faictes et quictances souffisante d'icellui escuier; et tout ce que, à la cause devant dicte, luy aura esté ainsi paié, sera aloué ès comptes et rabatu de la recepte d'icellui trésorier des guerres ou dud. receveur général qui païé l'aura, par noz très chiers et bien amez les gens des comptes de mondits. à Paris, et par tout ailleurs où il appartendra.
Ausquelx nous mandons, au nom que dessus, par ces mesures présentes, que ainsi le facent, sans contredit ou difficulté.
Donné à Chartres, le 23è jour de décembre l'an mil cccc et vingt-huit.
Par Monseigneur le Régent, duc de Bedford.
Signé : Milet.
(1) Cela signifie que la monture et son équipement sont correctement présentés.
(2) Les sommes sont exprimées en monnaie anglaise, mais les hommes sont payés en monnaie tournois française.
(Coll. M. B. de Molandon - Bull. SAHO - Médiathèque Orléans).
La montre d'une troupe venue des vicomtés d'Argentan et de Domfront :
Ces hommes sont requis, on directement pour le siège d'Orléans, mais pour les escortes des convois de vivres, munitions et finances concernant les troupes qui assiègent cette ville.
Montre de Jehan de Carrel, écuyer, chef de montres des nobles des Vicomtés d'Argentan et de Domfront, faite le 4 avril 1429, à Vernon, de lui, 4 hommes d'armes à cheval à gages entiers, et 10 autres à gages d'archers, pour service "au conduict des vivres" de 15 jours, à compter du 04/04/1429.
"C'est la monstre des nobles de la viconté de Argenten et Dompfront, qui passez ont esté à Vernon sur Saine, le 4è jour d'avril 1429 après Pasques, pardevant nous Jehan Popham et Guy Le Bouteillier, chevaliers, conseilliers du Roy nostres., et commissaires ordonnez de par ledit seigneur à prandre et recevoir toutes les monstres des nobles du duchié de Normendie et païs de conqueste, mandez audit lieu de Vernon venir faire leurs monstres et prandre gaiges d'icelui seigneur pour le conduict de l'armée du siège estans à présent devant Orliens."
"Lesquelz nobles nous avons recheus et passez aux monstres, par diverses manières selon leur abillemens; (équipement)
c'est assavoir : les uns pour prandre gaiges de lance à cheval, les aultres pour prandre demi-gaiges et les aultres pour prandre gaiges d'archier, par la fourme et manière qui s'ensuit :
Hommes passez à gaiges de lance à cheval :
- Thomas OUARDE, escuier,
- Jehan HEUDE, escuier,
- Richart DECERCEAU, escuier,
- Jehan DECARREL, escuier, chief de monstre,
- Jehan GREVE, escuier.
Archiers passez à gaiges :
- Jehan BRIDON,
- Thomas CHATTOLK,
- Jehan ALLY,
- Jehan LUCAS,
- Nicolas CHEROUDE,
- Thomas CENEST,
- Jehan SAULEY,
- Thomas KRAY,
- Richart QUELLE,
- Robin MOULLEREY.
Lesquels lances, montans cinq, et dix archiers, sont montez et armez souffisamment.
Tesmoing nos saings cy mis, l'an et jour dessusdits.
Signé : Popham, G. Le Bouteillier.
Publié le 12/12/2008 à 12:00 par geneapope
Le séjour de Gilles de RAIS à Orléans.
Gilles de RAIS, tueur d'enfants et pédophile notoire, était pourtant aussi l'un des compagnons de Jehanne la Pucelle, particulièrement lors du siège d'Orléans en 1428-1429. La Pucelle l'avait assez fortement marqué, pour qu'il dépense une fortune pour relater son histoire sur les lieux mêmes.
De septembre 1434 à août 1435, Gilles de Rais séjournait à Orléans où il faisait représenter le
"Mystère du siège d'Orliens", qui fit jouer des centaines de personnes. Cette (d'un Orléanais inconnu) de 20.529 vers, coûta à Gilles plus de 90.000 écus d'or. Une fortune ! (Madame Régine Pernoud, historienne connue, se contentait de dire qu'il prit à sa charge "quelques tréteaux".)
140 personnages défilaient sur scène, sur une sorte de podium installé près du pont, et les costumes ne devaient être portés qu'une seule fois !
Ce grand seigneur, compagnon de Jehanne la Pucelle, maréchal de France à 24 ans, fut aussi le plus sombre des tueurs d'enfants et des pédophiles, et on lui fit un procès à Nantes, où il fut condamné à mort.
A Orléans, il dépensait sans compter, et les habitants regrettèrent son départ. Il se déplaçait avec une suite énorme, et avait même une "chapelle", avec chantres, chorale et chanoines, plus encore sa "maison" militaire.
Il fallut loger tout ce monde à Orléans.
Gilles était logé à l'hôtel de la Croix d'Or, et son frère, René de la Suze, au Petit-Saumon.
Doyen, dignitaires et chanoines de sa chapelle à l'Ecu de Saint-Georges. Les chantres chez Jehan Fournier, à l'Enseigne de l'Epée.
Les hérauts d'armes, le capitaine d'armes, quatre chevaliers, l'armurier, le trompette et leurs compagnons en quatre auberges : la Tête-Noire, le Grand-Saumon, la Coupe et l'Image-de-Sainte-Marie-Madeleine.
Ses serviteurs et valets en trois autres hôtels. Il avait fait garder ses chariots et loger ses chevaux à la Roche-Boulet et à l'Enseigne du Fourbisseur. Quelques auberges encore pour ses invités et le reste de sa suite.
Il y eut quelques problèmes avec la justice du duc d'Orléans, comme pour Noël Le Couturier,
"serviteur de Monseigneur de Rais," qui fut alors condamné à une amende de 16 sous
pource qu'Estienne Galu, sergent de Monseigneur le duc, naguère vouloit faire l'exécution, en l'ostel de la Teste Noire ouquel ledit Noël estoit logié, pour la taille de l'Eglise, ledit Noël s'est adressé oudit sergent et lui a dit qu'il n'estoit que pilleux et qu'il n'emporteroit rien dudit ostel, et tira sa dague et fist plusieurs aultres rebellions."
Gilles de Rais, incapable de rembourser Jacques Boucher, trésorier du duc d'Orléans (celui qui logea Jehanne la Pucelle) à qui il devait 192 pièces d'or,
"pour cause de prest à luy faict de nouvelles dettes et en oultre aultres sommes qu'il doit, tant en or et argent comptant, comme en vins et aultres denrées... à paier avant que ledit seigneur parte d'Orliens", et il lui laissait en gage
ung cheval bayard à longue queue qui est ès mains de Colin Le Godelier, avecques ung cheval noir appelez Cassenoix et huit chevaulx de harnois garnis de harnois."
On sait ce qu'il advint ensuite de Gilles. Sa fortune dilapidée, ses erreurs commises contre le clergé, et surtout les très nombreuses disparitions d'enfants et leurs meurtres sauvages, tout cela allié à la pratique de la sorcellerie et de l'alchimie, lui valurent son arrestation, sa condamnation à mort après un procès dont la lecture soulève le coeur, et son exécution sur une île de la Loire, près de Nantes.
Il est curieux de constater que Jehanne fut amie de cet homme, dont elle ne soupçonnait certainement pas les dérives. Jehanne avait marqué Gilles, et il lui vouait une affection particulière. Le charisme de celle-ci et le fait qu'elle ressemblait physiquement à un jeune garçon, un jeune page, y sont-ils pour quelque chose ?
Toujours est-il qu'à Orléans, après les évènements de 1428-1429, Gilles se souvint d'elle et fit jouer ce spectacle, durant pas mal de temps, sur les lieux mêmes des combats, risquant de se ruiner, et c'est d'ailleurs ce qui arriva. Il ne pouvait déjà plus rembourser au trésorier du duc les sommes et les denrées empruntées.
Le spectacle.
Le spectacle était représenté, plusieurs fois par semaine, près des quais, au bord de la Loire, non loin du pont et des bastilles où s'étaient déroulées toutes les péripéties qui avaient abouti à la défaite des anglo-normands et à leur retrait qui précéda la délivrance de la ville où Jehanne et les chefs de guerre entrèrent en toute gloire, le dimanche 8 mai 1429, devant la foule en liesse.
Voici des passages où Gilles de Rais, qui tient son propre rôle, accompagné d'Ambroise de Loré, autre compagnon, conduit la Pucelle jusqu'à Blois et Orléans. Il a été déterminé à suivre les inspirations de Jehanne par Charles VII, qui déclare à la jeune fille :
"et pour conduire vos gens
vous aurez le Maréchel de Rais
et un gentilhomme vaillant
nommé Ambroise de Loré.
Je leur commande exprès
qu'ils vous conduisent où il vous plaira
en n'importe quel lieu, soit près ou éloigné."
La Pucelle remercie le Roi et le recommande à Dieu :
"Roy soyez toujours humble et doux
envers Dieu. Il vous gardera."
Gilles, aussitôt, parle à Jehanne :
"Dame, que vous plaît-il de faire ?
nous sommes près de Blois
si vous voulez vous y arrêter
et vous reposer deux jours ou trois
pour savoir où sont les Anglois
et aussi pour rafraîchir vos gens
ou si vous aimez mieux passer outre
et aller jusqu'à Orléans ?"
Gilles, trois strophes plus loin :
"Madame, tout incontinent
nous accomplirons votre volonté
nous ferons assembler nos gens
et présentement partirons
droit à Orléans, où nous vous mènerons,
Dame Jehanne, sans plus attendre."
Plus loin, les capitaines qui encadrent l'armée de la Pucelle discutent. Gilles intervient, y met ordre et décide, après avoir présenté son plan :
"Mieux vaut faire notre besogne
et ainsi éviter le danger
entrer par la porte de Bourgogne
et nous irons passer à Chécy."
Pour un peu, Gilles commande les opérations, sous l'oeil attendri de la Pucelle. Il a ce qu'on appelle "le beau rôle".
Mais c'est un rôle qui coûte cher. Durant cette période, devant les Orléanais ébaudis par tant de prodigalités. Il dirigeait les mises en scène, veillait à l'habillement des acteurs, dont les vêtements étaient taillés dans les tissus les plus fins, chaque costume ne devant être porté qu'une seule fois !
Il demeurant dans la ville, avec sa collégiale et sa cour, invitant la municipalité à de fastueux banquets, donnant fête sur fête, baillant ses aumônes aux pauvres, faisant des dons aux oeuvres et des cadeaux de prix aux notables.
On regretta son départ lorsqu'il prit la route de Blois pour s'en retourner.
Cela lui avait coûté 90.000 écus d'or, soit à peu près un milliard d'anciens francs de 1999 !
Publié le 12/12/2008 à 12:00 par geneapope
La bannière de Thomas de Scales, nommé seigneur d'Escalles par les Français, baron de Nucelles, vidame de Chartres, qui sera capturé à Patay, le 18 juin 1429, et périra de mort violente en 1460. Il sera le dernier Lord Scales.
(d'après Suzanne Gauthier)
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Travail réalisé en septembre 2004, pour la ville de Pontorson, au sujet de la forteresse dont furent tirés les hommes qui participèrent aux évènements du siège d'Orléans, en 1428-1429, jusqu'à la délivrance de cette cité par les troupes conduites par Jehanne la Pucelle, sous le commandement du capitaine de l'époque :
Le chevalier banneret Thomas de SCALES.
Chevalier banneret - Capitaine de Pontorson et de Domfront.
Thomas de SCALES était un grand seigneur et un capitaine réputé chez les Anglais.
Selon les documents, on trouve son nom orthographié : d'Escalles - Lescale, et même aussi Scalie ou de Scalys.
Seigneur de Nucelles, il avait des armoiries
" de gueules à six coquilles ou écailles, en anglais scale,
de Saint-Jacques, en argent."
Il était chevalier "banneret", la plus haute distinction après l'écuyer, le chevalier bachelier et le chevalier, et avait donc le droit d'arborer une bannière en haut de son château et au combat. Cet élément permettait aussi à ses troupes, lors des batailles, de toujours savoir où était le chef, et de pouvoir se regrouper autour de lui.
Les chevaliers bannerets étaient en principe les plus riches, et ce sont eux qui pouvaient lever les troupes les plus importantes. Celle de Thomas de Scales, pour le siège d'Orléans, était de 200 hommes, troupe déjà importante pour l'époque. C'est du moins pour ce nombre qu'il signe avec le duc de Bedford, Régent en France pour son neveu Henry VI, "qui se disait roi de France et d'Angleterre", une
endenture, le 23 décembre 1428, pour "50 hommes d'armes à cheval, lui compris, et 150 archers, pour servir au siège d'Orliens."
Chaque homme d'armes étant accompagné au moins d'un page et d'un coutillier (armurier ou valet d'armes), on peut dire que 50 hommes d'armes représentent 150 personnes. Avec les archers, cela fait au moins 300 combattants.
L'armée anglaise était à cette époque la mieux organisée. De plus, ses archers possédaient le "long bow", un arc très puissant qui avait déjà fait ses preuves dans des batailles comme celle d'Azincourt.
Le capitaine signait avec le roi (ou son représentant) une endenture, document en deux parties, dentelé (d'où le nom) où figurait de chaque côté le texte du contrat d'engagement. On le déchirait ensuite en deux morceaux, celui signé par le chevalier conservé par le roi (ou l'administration), et celui signé par le roi conservé par le chevalier ou l'écuyer.
Sur cette endenture, ce contrat, était précisé le nombre d'hommes à fournir, le but de l'engagement, la solde correspondante, et parfois des stipulations particulières.
Les soldes étaient les suivantes :
- chevalier banneret : 44 livres 15 sols 10 deniers tournois,
- chevalier bachelier et chevalier : 24 livres 15 sols 10 deniers tournois,
- écuyer, homme d'armes : 14 livres 15 sols 10 deniers tournois,
- archer : 5 livres tournois (*)
(*) Au siège d'Orléans, en février 1429, les archers avaient demandé et obtenu une augmentation de leur solde, pour cause de vie chère, qui passa de 5 à 6 livres pour les archers stationnés au siège.
En garnison, un contrôleur passait en revue (on nommait cela une
"montre") les troupes qui y étaient stationnées, tous les trois mois, et établissait un rapport précisant les présents, les manquants et le motif de leur absence.
"Sur les champs" (en campagne), la montre était faite en principe chaque mois, par des commissaires désignés, qui vérifiaient non seulement les hommes présents, par rapport à l'endenture, mais aussi si leur équipement et leur armement était adéquat. Il pouvait y avoir des amendes pour défaut d'équipement.
Les montres donnaient lieu à la rédaction d'un document, destiné aux trésoriers, pour que la solde puisse être élaborée. On payait les capitaines. Ceux-ci avaient des clercs qui rétribuaient ensuite chaque homme en fonction de ce qui lui revenait. Une quittance était alors établie, signée par le capitaine ou son représentant.
Thomas de Scales ayant été désigné comme l'un des chefs du siège d'Orléans, après la mort de Salisbury, touchait en plus des défraiements pour cette fonction :
"A luy... pour soustenir et maintenir son estat, durant le temps qu'il seroit en ce que dit est au service du Roy... par chascun moys, la somme de 200 livres tournois, oultre et pardessus ses gaiges et regars(*)... à commencer ledit paiement du jour qu'il party de la ville de Chartres pour aller en compaignie de mesdits. audit service, à paier de moys en moys... Commençans le 26 novembre 1428 jusques au 25 décembre 1428, premier moys.
Quictance le 16 décembre 1428 pour 200 livres tournoys."
"A luy... pour sondit estat du second moys de sondit service, finans le 25 janvier.
Quictance le 18 janvier pour 200 livres tournoys."
(*) Il est toujours précisé des"regars" lorsqu'il s'agit d'hommes d'armes. Jamais lorsqu'il s'agit uniquement d'archers. On ne sait pas au juste ce que c'est.
La troupe de Thomas de Scales était composée d'anglais venant d'Angleterre, d'anglais résidant en Normandie, et aussi d'hommes d'armes Normands.
Beaucoup de seigneurs Normands qui ne voulaient pas se soumettre aux occupants Anglais, avaient été dépossédés de leurs fiefs, qui avaient été donnés à des Anglais ou à des "faux-français", souvent pour une redevance ridicule, comme une épée, une hache d'armes, voire "un chapeau de violettes à la Saint-Jean".
De Pontorson, ce sons 20 hommes d'armes et 60 archers qui vont partir pour participer aux évènements du siège d'Orléans. La garnison de la forteresse était importante, pour fournir (et se démunir provisoirement, pour quelques mois) de tant de combattants. Avec les pages et les coutilliers, ce sont probablement 120 hommes qui composent ce détachement.
Sans doute quittèrent-ils Pontorson fin septembre 1428, rejoignant le reste de la troupe de Thomas de Scales.
Le 12 octobre 1428, Thomas de Scales arrive sous Orléans avec Salisbury. Il y revient le 1er décembre avec Talbot (autre capitaine anglais réputé qui mourra à plus de 80 ans, à la bataille de Castillon, les armes à la main) après avoir été nommé lieutenant du roi, et enfin, le 30 décembre, pour s'installer avec la plus grande partie de sa troupe à la bastille Saint-Laurent, à l'ouest d'Orléans.
Après la levée du siège, le 7 mai 1429, les troupes anglo-normandes se replient le lendemain à Meung-sur-Loire et Beaugency.
Ces hommes participent à la bataille de Patay, le 18 juin suivant, et Thomas de Scales y est fait prisonnier. On le retrouve à Rouen en septembre 1429. (voir ci-après sa biographie succincte)
C'était un capitaine aguerri. Il était aux batailles de Cravant et de Verneuil. En 1424, il est capitaine de Domfront (en plus de Pontorson) avec 60 combattants. Il l'est encore en 1433.
Trois ans après, il commande à Vire. Il est Vidame de Chartres - ou du moins en porte le titre - et sénéchal de Normandie en 1443.
Sa "retenue" pour la garde de Pontorson était importante : 80 hommes d'armes et 240 archers. De là, il tire le détachement qui va aller à Orléans.
Suivons un peu la troupe de Thomas de Scales :
"Pour gaiges et regars de luy", chevalier banneret, 41 hommes d'armes à cheval et 99 archers. Pour un mois, du 27/12/1428 au 26/01/1429.
Montre devant Jehan Popham et Richart Hankford, chevaliers, commissaires généraux. (montre probablement vers le 23/12 à Meung-sur-Loire ou Chartres)
Quittance au siège, le 18/01/1429, pour 1.145 livres 16 sols 8 deniers tournois.
"Pour gaiges et regars de luy", 35 hommes d'armes et 83 archers à cheval, "pour service au siège d'Orliens", pour les 4 jours de janvier restant.
Revue au siège, le 28/01/1429, devant Thomas Guérart, écuyer, et maître Raoul Parker (secrétaire du roi), commissaires.
Quittance au siège, le 28/01/1429, pour 130 livres 6 sols 8 deniers tournois.
"Pour gaiges et regars desdits 35 hommes d'armes et 83 archiers à cheval (et là, on précise :
"dont 20 lances, lui compris, et 60 archiers de sa retenue de Pontorson.)
Service au siège pour le mois de février 1429.
(au prix de 6 livres tournois par archer, nouvelle solde pour eux à compter de ce mois)
Revue au siège le 04/02/1429 - Mêmes commissaires.
Quittance le 27/02/1429, pour 1.060 livres 10 sols tournois."
En particulier pour les hommes tirés de la garnison de Pontorson :
"... auquel fut ordonné par mondit seigneur le Régent envoyer et tenir au siège devant Orliens le nombre de 20 hommes d'armes et 60 archiers à cheval... de la garnison dudit lieu de Pontorson.
"Gaiges et regars de luy", 19 autres hommes d'armes et 60 archers, pour service au siège de 33 jours, du 30/11/1428 au 28/12/1428, [i]"que fine le premier quartier (d'an) à luy paié de ladicte garnison de Pontorson."
Montre le 30/11/1428 à Chartres, devant mess. les baillis de Caen et de "Coustentin" (Cotentin), commissaires.
Quittance (probablement le même jour)
pour 709 livres 5 sols 6 deniers tournois.
"Et depuis le 28ème jour de décembre dessusdit, jusques au derrenier jour de février ensuivant inclus, a esté paié audit siège, pour luy et sesdictes gens, avec son aultre retenue de gens et endenture faicte pour servir audit siège, au compte à luy faict devant, dont il avoit faict monstre ensemble."
"Pour semblable cause, gaiges et regars de luy," 19 hommes d'armes et 60 archiers de ladicte garnison, pour service au siège du mois de mars 1429. (au prix de 6 livres tournois par archer)
"Monstre (le 25 mars ?) pour icelluy moys en plus grant nombre de gens de sa retenue (la troupe entière) pour servir audit siège."
Quittance au siège, le 25/03/1429, pour 685 livres 16 sols 8 deniers tournois.
"Pour semblable cause, gaiges et regars de luy et de sesdictes gens pour service du moys d'avril."
Revue au siège, le 20/04/1429, devant Thomas Guérart, écuyer, et maître Raoul Parker, secrétaire du roi, commissaires.
(à 6 livres tournois par archer)
Quittance au siège, le 20/04/1429, pour 685 livres 16 sols 8 deniers tournois.
nb : la solde est la même, et aussi le nombre d'hommes. Durant ces mois-là, les hommes de Pontorson n'ont donc probablement pas enregistré de pertes en hommes.
(Bibl. Nat. MSS., vol. 25.768, n° 835)
Dans la troupe de Thomas de Scales, les hommes de la garnison de Pontorson étaient au nombre de 20 hommes d'armes et 60 archers, de novembre 1428 à (au moins) fin avril 1429. Sans doute étaient-ils encore sur place lors de la reprise de "la bastide du bout du pont" (les Tourelles), le 7 mai 1429, par Jehanne la Pucelle et ses hommes, et ils se sont retirés le 8 mai à Meung-sur-Loire et Beaugency, avec le reste de l'armée anglo-normande.
Ils étaient à la bataille de Patay, le 18 juin suivant, puis à la retraite sur Etampes.
Quand sont-ils (et combien) rentrés à Pontorson ?
Ils étaient donc bien en tous cas stationnés au siège (et non pas affectés aux escortes des convois de vivres, munitions et finances) comme le prouve la solde des archers à compter de février 1429 : 6 livres au lieu de 5, payés uniquement aux archers stationnés à Orléans.
Garnison de Domfront :
Thomas de Scales était également capitaine de cette ville (garnison environ 60 combattants).
En avril 1429, quelques hommes de la garnison de Domfront furent requis pour ces escortes de convois de ravitaillement, en direction d'Orléans, sous le commandement d'un lieutenant :
"Gaiges et regars" de Thomas Strieby, homme d'armes, et 3 archers, dudit lieu de Domfront, pour service au conduict des vivres, de 15 jours à compter du 09/04/1429.
Montre à Paris, le 09/04/1429, devant Symon Morhier, prévôt de Paris, et Morelet de Béthencourt, chevalier du guet de cette ville, commissaires.
Quittance "dudit Strieby", à Paris, le 11/04/1429, pour 14 livres 17 sols 11 deniers tournois."
Eléments biographiques concernant Thomas de Scales :
Baron de Scales et de Nucelles - Vidame de Chartres - Seigneur de Lassey et sénéchal de Normandie.
(il connaissait bien cette région, y séjournant depuis au moins 1423, et après 1443)
- 04/06/1423 : capitaine de Verneuil (Verneuil-sur-Avre).
- 1424 : Lieutenant du Régent Bedford - Capitaine des villes et forteresses sur la Seine, entre Paris et Rouen - A la campagne du Maine.
- 08/07/1424 : Commande l'armée qui prend Gaillon.
- Août 1424 : A la bataille de Verneuil.
- 1425 : Capitaine de Conches.
- 31/10/1426 : Capitaine de Saint-James-de-Beuvron.
- 18/02/1427 : Lieutenant de Jehan Salvain, bailli de Rouen.
- 18/09/1428 : Institué capitaine de Pontorson.
- 26/11/1428 : Part de Paris pour le siège d'Orléans.
- 18/06/1429 : Fait prisonnier à la bataille de Patay.
- 12/09/1429 : Est à Rouen.
- 20/02/1430 : De nouveau capitaine de Domfront.
- 16/12/1430 : Assiège Saint-Cèlerin.
- 1433 : Avec Willughby, commande une armée en basse-Normandie, et assiège le Mont-Saint-Michel (avec une retenue considérable), qui ne sera jamais pris.
- 1434 : Retenu pour la garde de la bastille d'Ardenon, près du Mont.
- Août 1435 : Est à Paris.
- 27/10/1435 : Commande à Evreux des troupes avec Willughby.
- 15/09/1436 : Capitaine de Saint-Lô.
- 1437 : Capitaine de Vire et de Cherbourg.
- 05/07/1439 : Confirmation royale d'un don de 2.000 saluts d'or sur les terres normandes confisquées.
- 12/12/1440 : De nouveau capitaine de Domfront.
- Juin 1441 : Avec Falcombridge, il augmente la garnison de Pontoise.
- Juillet 1441 : Capitaine de Granville.
- 31/01/1443 : A Villedieu, en frontière des ennemis (les Français) qui occupent Granville et le Mont-Saint-Michel. Puis de nouveau capitaine de Domfront.
- 1460 : Périt de mort violente à la suite de la reddition qu'il fait de la Tour de Londres aux révoltés contre le roi Henry VI.
Voilà le capitaine qu'ont suivi les hommes des garnisons de Pontorson et de Domfront au siège.
Publié le 10/10/2008 à 12:00 par geneapope
Le testament du Bastard d'Orléans.
Jehan d'Orléans, comte de Dunois, fut, on le sait, l'un des compagnons de Jehanne la Pucelle durant son épopée.
Ce prince de sang royal était le fils de Louis d'Orléans, frère du roi Charles VI, provenant d'un adultère avec Mariette d'Enghien.
Jehan d'Orléans, comte de Dunois et de Longueville, seigneur de Parthenay, est décédé à Lay, près de Paris, le jeudi 24 novembre 1468.
Avec son épouse, Marie d'Harcourt, ils eurent 4 enfants :
- Marie, qui épousera Louis de Bourbon, puis, en août 1466, Louis de la Haye,
- Catherine,
- François, qui épousera Agnès de Savoie (les deux inhumés, avec leurs père et mère, dans la Basilique de Cléry, près d'Orléans),
- un autre enfant, mort jeune,
- Jehanne.
Le 3 octobre 1463, à Beaucaire, Jehan d'Orléans dépose un testament chez maître Denys Chastellas, notaire apostolique impérial et royal. En voici les dispositions :
- Chapelle St. Jean-Baptiste, à Cléry : 800 écus d'or pour l'édifice et 400 écus d'or pour les ornements.
- 7.000 messes (4.000 des Trépassés et 3.000 de Notre-Dame).
- 700 francs pour le mariage de jeunes filles.
- 700 francs pour les pauvres d'Orléans, Chartres, Blois, Châteaudun, Beaugency, Longueville, Parthenay (100 francs par ville).
- 700 francs pour leurs suivants et suivantes (à la discrétion des exécuteurs).
- 100 francs pour les réparations de l'église des Cordeliers de Châteaudun.
- 2.000 francs pour l'achèvement de la chapelle de leur château de Châteaudun et pour le logis des religieux qui y seront.
Deux grandes messes par jour (une de Notre-Dame et l'autre du jour). Il faudra un Prieur, quatre prêtres et quatre choriaux de l'ordre de Saint-Augustin, "de règle et habit comme sont les religieux de Sainct-Victor de Paris".
- 200 francs par an pour l'entretien du Prieur et des religieux, tant en deniers qu'en blé, vin, bois, sur les revenus du duché d'Orléans, des comtés de Chartres, Blois et Dunois, et sur leurs terres et seigneurie de Hâvre au pays de Hainaut.
- 40 livres tournois pour une messe basse dite chaque jour en l'église de Vouvan (?) pour le salut de leur fille Jehanne qui y est enterrée.
- Paiement des dettes des étudiants qui veulent maîtres en théologie à Paris.
Il déshérite sa fille Marie (1), qui n'a pas voulu être religieuse, et a épousé, sans leur consentement, Louis, Bâtard de Bourbon.
On poursuit :
- 40.000 écus d'or, c'est-à-dire la seigneurie et baronnerie de Gez (Geix), au pays de Savoie, près de la ville de Genève (terres = 23.000 + 17.000 en écus d'argent, d'or et meubles, à leur fille Catherine. Si elle n'a pas d'enfant, tout reviendra à son frère, François).
- Tous les autres biens, terres et seigneuries pour leur fils, François, et ses descendants. S'il n'a pas d'enfant non plus, cela reviendra à Catherine.
Exécuteurs :
- le seigneur de la Héloutière,
- Me Etienne Lefuselier, doyen de l'église St. Sauveur, de Blois,
- Me Florent Bourgoin, bailly de Dunois.
Fait à Arles, chez Jehan Arlatan, chevalier. (2)
Témoins :
- Jehan Houlet, chevalier, seigneur de la Héloutière,
- Guillaume de Théligny, écuyer,
- Me Jehan Garnier, maître ès arts et licencié en décrets,
- Me Nouel Bouissard, prêtre clavaire et gouverneur de la maison de l'Archevêché d'Arles,
- Me Guillaume Bochery, de l'église St Lucien d'Arles,
- Me Raimond Antoine, prieur de Notre-Dame,
- Me Jehan Rohardi (3), notaire royal d'Arles,
et Me Denys Chastelas.
Le lendemain, 4 octobre, Jehan et Marie se font donation mutuelle de leurs biens et héritages, en présence des témoins suivants :
- le seigneur de la Héloutière, chevalier,
- Guillaume de Théligny, écuyer,
- Jehan Garnier,
- Nouel Bouissard,
- Guillaume Bochery,
- Raimond Antoine,
- frère Raoul Ferrand, de l'ordre de Saint-Dominique.
Contresigné par Nicolas Imbert.
nb : ce testament n'est pas le seul qu'ait fait Dunois. On lit en effet dans le P. Anselme (t. 1er, p. 213), aux ducs de Longueville :
"Enfin comblé d'honneur et de biens, il mourut à Lay, près Paris, le jeudi 24 novembre 1468, après avoir fait un premier testament avec sa femme Marie d'Harcourt, à Arles, le 3 octobre 1463; un deuxième, écrit de sa main, à Paris, la veille de Saint-Michel 1468, et un codicille avec l'état de ses dettes, aussi à Paris, le 8 novembre suivant."
Inhumés à Cléry-Saint-André (près d'Orléans) :
- Jehan de DUNOIS
- Marie d'HARCOURT, son épouse,
- François de LONGUEVILLE, leur fils,
- Agnès de SAVOIE, épouse du précédent.
La visite de cette Basilique est recommandée. Entre autres, on y trouve le crâne de Louis XI et celui de sa femme.
(1) Marie d'Orléans se fit enlever par Louis, bâtard de Bourbon. Ses père et mère la déshéritent par leur testament commun du 03/10/1463, et firent casser le contrat de mariage passé entre elle et son ravisseur, par sentence de l'Official d'Avignon du 16/04/1464. Depuis, elle épousa, par contrat du 16/08/1466, Louis de la Haye, seigneur de Beaumont, seigneur de Passavant et de Mortagne, en Poitou.
(2) La famille d'Arlatan est une famille noble et ancienne, qui habitait Arles au 15ème siècle, où elle remplissait des emplois publics éminents. L'Hôtel d'Arlatan existait encore en 1856.
(3) Le texte de l'acte des archives du Loiret porte "Richard". Il n'y a eu de notaires du nom de Richard, à Arles, que dans le 17ème siècle. Un Jehan "Rohardi", entré en exercice en 1454 comme notaire à Arles, a continué ses fonctions jusqu'en 1472; c'est donc le nom de "Rohardi" qu'il faut lire ici.
Publié le 21/09/2008 à 12:00 par geneapope
Richart GREY, capitaine de la garnison de Janville en 1429.
(image : http://corpusetampois.com - cartes Cassini)
La prise de Janville par les troupes anglaises.
Le comte de Salisbury, venu d'Angleterre, entrait en campagne.
Salisbury commença par mettre en l'obéissance du roi d'Angleterre
"aucunes meschantes places que tenoient ses adversaires".
Il explore d'abord le terrain entre Dreux et Chartres. La première ville prise, d'après tous les historiens, est Nogent-le-Roi, suivie bientôt de Rambouillet, Brethencourt, Rochefort, Châteauneur-en-Thimerais et Courville.
Chartres, depuis longtemps anglais, avait augmenté sa garnison depuis le mois de février 1428 et réparé ses fortifications.
Salisbury reçut dans cette ville un brillant accueil, et y employa quelques jours à concentrer et reposer ses troupes.
De Chartres, il se rend à Janville. Frontière du pays Chartrain, cette petite ville était une des châtellenies royales de l'Orléanais. A ce titre, elle avait son capitaine permanent et une petite garnison dans son château et sa grosse tour (qui avait jadis servi de prison d'état).
Elle était entourée d'une double enceinte, de profonds fossés et de murailles flanquées de tourelles, et percées de quatre portes.
A distance rapprochée, se trouvaient Le Puiset, Toury, lieux défendables, et de petites paroisses qui avaient fortifié les châteaux et les tours des églises : Trancrainville, Oinville, Saint-Liphard, Tillay-le-Péneux, Santilly-le-Moutier, Tivernon, Bazoches-les-Gallerandes et, dans un rayon plus éloigné, Patay, Terminiers, Sougy, Poupry, Artenay.
Salisbury donne d'abord l'assaut au Puiset, et fait pendre tous les soldats qui s'y trouvaient.
Toury, d'où Giraud de La Pallière s'enfuit, malgré sa bravoure habituelle, se rend, mais est néanmoins incendié.
Puis le gros de l'armée entoure Janville qui fait plus de défense et se laisse bomberder. Prégent de Coëtivy s'y était jeté avec sa compagnie pour organiser la résistance.
Salisbury lui-même, dans sa fameuse lettre écrite au Maire et aux Aldermen de Londres, et datée de Janville le 5 septembre 1428, rapporte qu'il s'approcha plusieurs fois de la ville, et que le dimanche précédent, "il y a huit jours", il s'empara
"de Yenville par le plus fort assaut qu'il vit jamais".
Huit jours avant le 5 septembre, c'est le 29 août. Ces deux dates sont citées exactement par la "Chronique de la Pucelle".
Une quittance de Lancelot de Lisle, donnée le 28 août,
"au siège devant Yenville", indique que les anglais n'en étaient point encore maîtres ce jour-là. Les défenseurs s'étaient retirés dans la tour, avant de se rendre à discrétion.
Là sont pris, entre autres, Prégent de Coëtivy, le Gallois de Villiers, Gilles des Ormes, seigneur de Saint-Germain-en-Chartrain, et Simon Davy, seigneur de Saint-Péravy-Espreux, qui fut enfermé à la bastille de Saint-Antoine à Paris.
Salisbury mit la ville à rançon, comme prise d'assaut, et chacun dut contribuer au rachat pour une somme importante. Il eut, de sa tierce : 13 livres 6 sols 8 deniers tournois pour sa part sur 9 prisonniers.
Le pillage et l'incendie se mirent de la partie; les papiers du receveur et du contrôleur du grenier à sel furent dispersés ou brûlés.
Janville devint pour un temps le siège de l'armée anglaise, le lieu de concentration et d'approvisionnement.
Du 20 au 28 août 1428, 191 hommes d'armes et 545 hommes de trait (archers et arbalétriers) y font leurs revues, et d'autres encore les jours suivants.
De Mantes, le trésorier demanda à Salisbury une escorte pour venir payer ses gens d'armes. Eustace Gaudin et ses gens vinrent au-devant de lui.
Au même moment, un voiturier de Rouen, Martin Foulon, apportait sur
"trois chevaulx à bast" (sorte de coffre qui se mettait à dos de cheval), une partie des 8.000 livres que Pierre Surreau destinait à la solde de la moitié de l'armée anglo-normande assemblée à Janville.
On peut se livrer ici à un calcul approximatif, mais sans doute néanmoins assez proche de la réalité.
On trouve beaucoup de quittances pour le "groupe de base" de l'armée anglaise, qui est de un homme d'armes et 3 archers, soit 4 hommes (plus les pages et les coutilliers, qui ne sont pas indiqués dans les calculs).
Leur solde était de 29 livres 5 sols 10 deniers tournois, que nous arrondirons à 30 livres.
287 de ces groupes font donc 8.010 livres (267 fois 30 livres).
Donc, 267 hommes d'armes + 801 archers (trois fois plus), font 1.068 hommes environ qui se tenaient alors regroupés à Janville à la fin du siège de cette ville.
Le neveu de Salisbury, lord
Richart GREY, fut un peu plus tard nommé capitaine de Janville, avec 7 hommes d'armes à cheval, 8 hommes d'armes "à pié" et 43 archers, troupe qui restera quasi identique depuis sa prise de fonction, le 27 décembre 1428, jusqu'au 3 mai 1429, jour de sa mort au siège d'Orléans.
De Janville, sont lancées dans plusieurs directions des colonnes volantes. L'une d'elle, par Artenay, Poupry, Terminiers et Patay, alla soumettre quelques petites places entre cette dernière ville et Châteaudun, Sougy, Saint-Sigismond, Porcheresse, Machelainville et la Rainville, pour aboutir à Marchenoir, où Mondot de Lansac et George Snylinkton font revue de leurs 30 hommes et 87 archers.
Une autre colonne, conduite par Richart Hankford, alla chevaucher, vers le 5 septembre, devant la ville et le château de Meung, qui se rendirent à l'obéissance du roi d'Angleterre.
De Meung, les anglais se rendirent à Montpipeau, où ils entretiendront une garnison pendant la durée du siège (hommes de Richart Waller; voir l'article).
Plus tard, ils entrent à Beaugency, dont la garnison se retire au château et aux fortifications du pont pour se rendre le 25 septembre 1428.
Salisbury eût encore là, pour sa tierce, le profit du rachat de 5 prisonniers et 11 livres 2 sols 2 deniers tournois pour le prix de vente du froment et de l'avoine trouvés au château de Beaugency, à l'instant de sa reddition.
En amont de la Loire, les villes de Jargeau, Sully et Châteauneuf-sur-Loire étaient soumises. L'étau se refermait et le siège de la ville d'Orléans pouvait commencer.
Richart GREY
(aussi : lord Richart GRAY, GRèS)
Chevalier - Seigneur de Grey - Neveu de Salisbury, le chef de l'armée anglaise.
Capitaine des ville, tour et forteresse d'Yenville (Janville, en Beauce).
Tué au siège d'Orléans le 3 mai 1429.
- Endenture (contrat d'engagement) avec le Régent anglais Bedfort, le 20 janvier 1429, pour la durée du siège d'Orléans,
"pour sauvegarde d'Yenville".
A payer de mois en mois, au début de chaque mois, aux "gaiges" (gages, solde) de :
. homme d'armes à cheval : 12 deniers d'esterlins le jour,
. homme d'armes "à pié" : 8 deniers d'esterlins le jour,
. archer : 6 deniers d'esterlins le jour,
pour 7 hommes d'armes à cheval, lui non compris, 8 hommes d'armes à pied et 45 archers.
(nb : les soldes étaient exprimées en monnaie anglaise, mais les hommes étaient payés en monnaie française tournois).
Pour le premier mois, du 27/12/1428 au 26/01/1429.
Montre (revue militaire de contrôle) devant Jehan Popham et Jehan Hanneford, chevaliers, commissaires.
Quittance à Chartres, le 21/01/1429, pour 381 livres 17 sols 6 deniers tournois.
Cette troupe de 60 combattants forma la garnison anglaise de Janville, pendant la durée du siège d'Orléans, jusqu'à ce que cette ville soit reprise par les troupes françaises.
Richart GREY avait reçu une autre endenture, le 22/12/1428,
"pour servir au siège d'Orliens", pour une troupe identique, prévue pour 20 hommes d'armes à cheval, lui compris, et 40 archers.
"Gaiges" de lui, 14 hommes d'armes et 46 archers à cheval. Pour un mois, du 21/12/1428 au 20/01/1429.
Montre le 27/12/1428, devant Jehan Popham et Jehan "Hanford", commissaires.
Quittance, le 30/12/1428, pour 461 livres 16 sols 6 deniers tournois.
"Gaiges" de lui, 15 hommes d'armes et 40 archers à cheval. Pour service de 10 jours, du 20/01 au 31/01/1429.
Montre, le 28/01/1429, devant Phillebert de "Molans" (Mollens), écuyer, et maître Raoul Parker, secrétaire du roi, commissaires.
Quittance, le 25/01/1429, pour 148 livres 17 sols 9 deniers tournois.
"Et du surplus de sondit service audit siège, a ou doit avoir esté paié par Andry d'Esparnon, trésorier des guerres en France, à ce ordonné, pour 610 livres 15 sols 3 deniers tournois".
Donc :
- Troupe A - Affectée à la garde de Janville :
Du 27/12/1428 au 26/01/1429, pour le premier mois, 7 hommes d'armes à cheval, 8 à pied et 45 archers, soit 60 combattants.
Il semble que cette troupe, en garnison à Janville, reste avec un effectif constant.
Richart GREY avait dû laisser à l'un de ses lieutenants le commandement de cette troupe.
Il commandant lui-même le reste de ses hommes, au siège, à Orléans.
- Troupe B - Au siège d'Orléans :
Le nombre d'hommes a dû varier un peu au fil du temps. Sans doute des soldats furent-ils blessés ou tués, ou affectés temporairement aux escortes des convois de vivres, auxquelles presque chaque troupe participait.
. lui + 14 hommes d'armes + 46 archers, du 21/12/1428 au 20/01/1429 = 60 combattants.
. lui + 15 hommes d'armes + 40 archers, pour les 10 jours jusqu'à fin 01/1429 = 56 combattants.
Ces hommes stationnèrent au siège d'Orléans, jusqu'à la prise d'assaut du fort des Tourelles, le 7 mai 1429, et la retraite des anglais, le 8 mai, sur Meung et Beaugency.
Le chef était mort entre temps, tué au siège.
La troupe fut certainement commandée alors par un autre lieutenant, ou bien incorporée à un détachement plus important, sous les ordres d'un autre chef.
Sans doute participèrent-ils aussi à la bataille de Patay, le 18 juin 1429, et au retrait sur Etampes, probablement avec ceux de Janville.
Tué le 3 mai 1429 à Orléans, lors d'une escarmouche, la mort de Richart GREY est relatée ainsi dans le "Journal du siège" :
"... y tua maistre Jehan d'une couleuvrine cinq personnes à deux coups. Et desquelz cinq fust le seigneur de Grez... dont les anglois firent grans regretz, parce qu'il estoit de grant hardiesse et vaillance".
Richart GREY, en 1414, avait été l'un des négociateurs pour le mariage du roi anglais Henry V avec Catherine de France.
Le 5 décembre 1414, il avait reçu des pouvoirs pour la négociation des trêves, et, en novembre 1418, il était délégué d'Henry V à la conférence d'Alençon.
Un chef militaire, donc, doublé d'un diplomate, pour ce chevalier qui trouva la mort au siège d'Orléans.
Ref. : Bull. SAHO - Médiathèque Orléans.
Publié le 20/09/2008 à 12:00 par geneapope
Richart WALLER, capitaine de Montpipeau en 1429.
Un chevalier anglais ayant participé aux opérations du siège d'Orléans en 1428-1429.
(image : château de Montpipeau - tirée du site : http://www.huisseausurmauves.fr)
Richart WALLER
Ecuyer, bailli et capitaine d'Evreux, capitaine de Conches.
Capitaine de Montpipeau le temps du siège d'Orléans.
Montpipeau : lieu-dit de la commune de Huisseau-sur-Mauves, près de Meung-sur-Loire (Loiret), où existait une forteresse tenue par la famille de Mortemart. Les tours d'entrée du château existent toujours.
Il participe à la campagne de Beauce, et sans doute participa-t-il à la prise de Montpipeau, dont il fut nommé capitaine. Il figure aussi au siège d'Orléans.
Le 6 novembre 1428, il fait "montre" (revue militaire) à Orléans pour 25 hommes d'armes et 80 archers, devant Richart Ponengys (Ponnyngz) et "HOO", commissaire de Salisbury, alors chef de l'armée anglaise mobilisée pour le siège.
Ces troupes font partie des "200 lances de Normandie" qui avaient été levées quelques temps auparavant.
Les gages sont payés par le trésorier Pierre Surreau.
Endenture (contrat d'engagement) du 23/12/1428.
Retenu capitaine de 24 hommes d'armes et 84 archers à cheval.
Assavoir :
- 20 hommes d'armes et 60 archers pour servir au siège d'Orléans,
- 4 hommes d'armes et 24 archers, pour
"la garde et deffense des chastel et forteresse de Montpipeau".
Pour "gaiges et regars" de 23 hommes d'armes et 81 archers à cheval,
"pour leur service tant au siège et conqueste sur la rivière de Loyre, comme à la garde dudit Montpipeau."
Pour le 5ème mois, du 17/11 au 16/12/1428.
Montre à Montpipeau, le 05/12/1428, devant Richart Fortescu et Guillaume Cotemore, écuyers,
"à ce commis par mesdissires de Suffork, de Talbot et de Scales" (qui étaient les trois chefs au siège depuis la mort de Salisbury).
Quittance, le 27/12/1428, pour 745 livres 4 sols 2 deniers tournois.
(104 hommes sont alors à Montpipeau. Il manque l'écuyer et 3 archers. Sans doute est-il à Orléans avec cette petite escorte).
"Pour gaiges et regars de luy", 23 hommes d'armes et 83 archers à cheval,
"pour le service tant audit siège et conduict des vivres comme audit Montpipeau."
Pour un mois, du 17/12/1428 au 16/01/1429.
Revue le 25/12/1428 devant Thomas Flamyng et Jehan Dedem, écuyers, envoyés par messires Jehan Popham et Jehan Hanneford, chevaliers, commissaires.
Quittance le 13/01/1429, pour 770 livres.
Toute la troupe semble encore être basée à Montpipeau, où les commissaires envoient deux écuyers pour faire la montre.
De là, ceux basés à Montpipeau gardaient la forteresse, les autres étant occupés à surveiller la région, et servir parfois également pour les escortes des convois de vivres et de munitions.
"Pour gaiges et regars de luy", 23 hommes d'armes et 83 archers à cheval,
"pour leur service comme ci-dessus", de 14 jours
restans et finans le derrenier jour dudit moys de janvier inclus."
Deux montres :
- 20 lances et 60 archers, le 17/01/1429, devant Philebert de Mollens et maître Raoul Parker, commissaires,
- 4 lances et 23 archers, le 24/01/1429, pour la garde de Montpipeau, devant Thomas Giffart, écuyer, et ledit Philebert de Mollens.
Quittance le 18/02/1429, pour 359 livres 6 sols 8 deniers tournois.
"Pour gaiges et regars de luy," 19 hommes d'armes et 60 archers à cheval,
"pour service au siège." - Mois de février 1429.
Au prix de 6 livres tournois par archer.
Revue le 05/02/1429,
"devant ledit Philibert et Parker."
Quittance au siège, le 03/03/1429, pour 655 livres 16 sols 8 deniers tournois.
Cette fois, ces hommes sont bien stationnés au siège, car les archers touchent la paie prévue pour ceux "estans et restans" à Orléans, dans l'une des bastides de la cité.
"Pour gaiges et regars" de 4 hommes d'armes et 23 archers à cheval,
"pour leur service à ladite garde de Montpipeau". - Mois de février 1429,
"lesquelz n'ont esté paiez que au prix de 100 sols tournois (5 livres) pour archiers..."
(Les archers basés sur Orléans avaient demandé et reçue une augmentation de leur solde, pour cause de vie chère. Cette portion de la compagnie de R. Waller, basés à Montpipeau, n'en bénéficie pas, et touche la solde normale des archers).
Montre le 07/02/1429, devant Thomas Giffart et Ph. de Mollens, écuyers, commissaires.
Quittance le 06/03/1429, pour 174 livres 3 sols 4 deniers tournois.
"Pour gaiges et regars" de 20 hommes d'armes et 60 archers à cheval,
audit siège d'Orliens", pour service de mars, au prix de 6 livres tournois par archer et par mois, soit : 655 livres 16 sols 8 deniers tournois;
"et pour le service d'iceluy moys (mars) des autres 4 hommes d'armes et 24 archiers, à la garde dudit Montpipeau, payez à 100 sols tournois (5 livres) pour archier pour ledit moys", soit 179 livres 3 sols 4 deniers tournois.
"Monstre ensemble audit siège d'Orliens", le 20/03/1429, devant Thomas Guérart, écuyer, et maître Raoul Parker.
Pour le tout, quittance au siège, le 24/03/1429, pour 835 livres tournois.
La troupe est à nouveau réunie en entier, pour le montre du 20 mars. La montre dut se faire à Orléans.
Sans doute avait-on besoin de renfort sur place. Waller continue-t-il à assurer la garde de Montpipeau, en avril, où fut-il remplacé, par exemple, par des hommes venus de la garnison voisine de Meung ?
Donc :
- Avant 06/11/1428 : 25 hommes d'armes + 80 archers = 105 hommes.
- 17/11 au 16/12/1428 : 23 hommes d'armes + 81 archers = 104 hommes.
- 17/12/1429 à fin 01/1429 : lui + 23 hommes d'armes + 83 archers = 107 hommes.
- Février 1429 : lui + 19 hommes d'armes + 60 archers = 80 hommes, et 4 hommes d'armes + 23 archers (Montpipeau) = 27 hommes. Soit en tout : 107 hommes.
- Mars 1429 : 20 hommes d'armes + 60 archers = 80 hommes; et 4 hommes d'armes + 24 archers (Montpipeau) = 28 hommes. Soit en tout : 108 hommes.
Le total de la troupe, qui reste constant, doit bien être de 108 hommes, le chef n'étant parfois pas précisé, parfois compté comme homme d'armes.
Notice biographique succincte :
- Août 1424 : à la bataille de Verneuil.
- 1425 et 1426 : Bailli d'Evreux - Capitaine de Conches.
- 18/07/1427 : idem.
- Nov. 1427 : devant Rambouillet.
- 1427 : Envoie des femmes comme "espies" (espion) dans les forteresses de l'Orléanais.
- 22/07/1428 : "Sur les champs", sous Willughby.
- Nov. 1428 : Chargé de la garde de Montpipeau, une partie de sa troupe y séjourne. Le reste est à Orléans.
- 30/07/1429 : Bailli d'Evreux - Capitaine de Conches.
- Sept. 1430 : Bailli de Caen.
- 07/09/1431 : Sans charge.
Il aura donc séjourné au moins durant 7 années en France.
Publié le 19/09/2008 à 12:00 par geneapope
Comment les français reprirent la ville de Verneuil.
(image : château de Verneuil-sur-Avre - Tirée du site http://www.casteland.com)
Charles VII commence la reconquête de la Normandie (juillet 1449)
Descriptif : Après tous les troubles, l'occupation anglaise va se terminer avec la remise de la Normandie dans le giron français, initiée par la délivrance d'Orléans par Jehanne la Pucelle.
Maître de Paris et réconcilié avec le duc de Bourgogne, Charles VII se retrouve roi de France. Il devra consacrer la seconde partie de son règne à reprendre l'oeuvre monarchique, interrompue par les désastres de la guerre de Cent Ans et l'incapacité des premiers Valois. Sa tâche consistera donc :
- 1° A recommencer la guerre contre les Anglais, pour les chasser définitivement du territoire national,
- 2° A réaliser les projets d'organisation administrative, militaire, financière et judiciaire que Charles V avait laissés seulement ébauchés,
- 3° A combattre l'ancienne féodalité indépendante et la nouvelle féodalité issue de la maison de France, celle des princes apanagés, pour élever sur les ruines des maisons seigneuriales, définitivement assujetties ou détruites, le pouvoir unique, fort et incontesté de la royauté.
Ce qui caractérise, en somme, le règne de Charles VII, c'est la fondation du régime absolutiste, que devaient développer Louis XI et ses successeurs.
L'une des premières tâches de Charles VII fut de reprendre aux anglais la ville de Verneuil, qui devint ainsi l'une des premières villes libérées de Normandie, pour la reconquête du royaume de France.
Nous allons voir de quelle manière, relatée par des chroniqueurs de l'époque.
"En ce temps un meunier de la ville de Verneuil qui avait son moulin contre les murs d'icelle ville, fut battu par un Anglais faisant le guet parce qu'il dormait. De dépit, il alla vers le bailli d'Evreux et lui promit, moyennant certaines conventions faites entre eux, de le bouter dedans la ville.
Et s'assemblèrent messire Pierre de Brézé, sénéchal de Poitou, le bailli d'Evreux, Jacques de Clermont, et autres; ils chevauchèrent tant que tous ensemble se trouvèrent le neuvième jour de juillet l'an 1449, au point du jour, près des murs de la ville de Verneuil.
Icelui meunier, qui faisait le guet ce jour-là, fis descendre les autres qui étaient de guet plus matin qu'ils n'avaient accoutumé, et parce qu'il était dimanche ils se hâtèrent d'aller à la messe pour déjeuner."
"Les français, à l'aide du meunier, dressèrent leurs échelles au droit du moulin en entrèrent dans la ville sans être aperçus. Ils étaient dedans cent vingt anglais dont aucuns furent tués et pris, les autres se retirèrent au château en grande hâte.
Le lendemain le meunier ôta une partie de l'eau des fossés du château, lequel fut assailli et défendu moult valeureusement, mais à la fin fut pris d'assaut, et il y eut moult belles armes faites et spécialement par le sénéchal.
Et là furent morts et pris plusieurs anglais; les autres se retirèrent en grande hâte dans la tour Grise, laquelle était moult forte et imprenable tant qu'il y eût à manger dedans, car elle est haute et grosse, séparée du château, bien garnie et environnée de fossés pleins d'eau."
Autre extrait de chroniques de l'époque, où est également racontée la reprise de Verneuil, pratiquement de la même manière, confirmant ainsi le premier récit, et nous faisant part d'autres détails :
"... Un peu auparavant, messire Pierre de Brésay, sénéchal de Poitou, le bailli d'Evreux, et Jacques de Clermont, avaient pris la ville de Verneuil, au Perche, par le moyen d'un meunier qu'un anglais de la garnison avait beaucoup de fois battu et maltraité.
Dedans laquelle ville étaient six à sept-vingts anglais, dont une partie fut tués et pris, et les autres se retirèrent dedans le château et la grosse tour Grise. Lequel château fut enfin prit d'assaut, combien que ceux de dedans missent grand'peine à la défendre; auquel exploit, selon la coutume renommée de ceux qui y étaient, ledit sénéchal se porta et conduisit très vaillamment de sa personne.
Quant à ladite tour, qui était très forte et imprenable tant qu'il y aurait des vivres dedans, elle tint encore environ un mois, au bout duquel terme, pource que ceux de dedans n'avaient plus aucune espérance de recevoir secours, ils la rendirent aux français, et s'en allèrent à Rouen..."
C'est donc par ruse que la ville de Verneuil se libéra du joug des anglais. Charles VII continua la reconquête de son royaume.
Quelques commentaires :
La ville de Verneuil fut donc reconquise grâce à un meunier qui avait son moulin installé le long des remparts. Il s'agit d'une vengeance, car ce meunier, qui était assujetti au guet de la ville, avait été plusieurs fois molesté par un anglais de la garnison. Côté français, dans les villes, les gens des cités étaient aussi réquisitionnés pour monter la garde sur les remparts et les tours, et formaient pour cela des "dizaines", commandées par un "dizenier", soit des groupes de dix hommes répartis dans les quartiers.
Par contre, on ne saura jamais quelles ont été les "conventions" convenues entre le meunier et le bailli d'Evreux, pour que les français puissent pénétrer dans la ville, avec des échelles, et ainsi anéantir la résistance anglaise.
Les chiffres concordent assez entre les deux chroniqueurs au sujet du nombre d'hommes de la garnison anglaise. Le premier parle de "cent vingt" hommes, le second en dénombre "six à sept-vingt", soit 120 à 140, garnison somme toute importante.
Le second nous apprend que le reste de la garnison anglaise était retranché dans la tour Grise, et que celle-ci était séparée du château. Il précise qu'ils tinrent environ un mois, et ne se rendirent que lorsqu'ils n'eurent plus à attendre ni vivres ni secours.
Dans le texte du chroniqueur Mathieu de Coucy, ci-après, on apprendra que Jehan de Talbot, seigneur et capitaine anglais (qui était au siège d'Orléans, ville délivrée en 1429 par la Pucelle Jehanne) avait réuni des renforts pour aller à Verneuil, renforcer la garnison et tenir la ville. Mais les français, grâce à cette ruse, reprirent Verneuil avant que Talbot n'eut réuni les troupes nécessaires :
"En après, ledit comte de Saint-Pol, partant avec ses gens dudit lieu d'Ailly-sur-Noye, tira devers Beauvais, où il trouve le comte d'Eu qui avait environ cinq à six cents combattants, et tous ensemble prirent leur chemin pour aller devers Rouen, où ils s'attendaient de pouvoir entrer par le moyen d'aucuns des citoyens de la ville; mais leur entreprise fut rompue en partie pour ce coup, à cause que le seigneur de Tallebot, qui avait emmené un grand nombre d'anglais pour penser bailler secours à ceux de Verneuil, était déjà retourné dedans ladite ville de Rouen..."
Peut-être les français ont-ils battu de vitesse Talbot, reprenant ainsi la ville, mais il se peut également que Talbot ait préféré laisser Verneuil, moins importante, pour plutôt défendre Rouen pour empêcher, provisoirement, que les troupes françaises ne l'investissent.
Ref. :
- 1° "Charles VII et la monarchie absolue (1438-1461)", publié par B. Zeller et A. Luchaire, docteurs ès-lettres - Paris - Librairie Hachette - 1886.
- 2° Mémoires de Jacques du Clercq, liv. I, ch. III).
- 3° Chroniques - Mathieu de Coucy - ch. XXXIV.
Quelques mots sur les chroniqueurs cités :
Jacques du CLERCQ
Ce chroniqueur, né en 1420, mourut après 1467. Il était fils de Jacques du Clercq, conseiller et avocat du duc de Bourgogne. Sa chronique s'étend de l'an 1448 à la mort de Philippe le Bon, duc de Bourgogne (juillet 1467). Elle est divisée en cinq livres, et c'est au premier de ces livres que sont empruntés les extraits ci-dessus.
Au point de vue politique, la chronique de Du Clercq présente un caractère neutre ou mixte, car, par ses alliances, sa famille, il était engagé à la fois dans le parti orléanais et dans le parti Bourguignon. Il est probable qu'elle est plutôt une compilation écrite à poste fixe qu'un récit "de visu". Du Clercq a réuni aux données qui lui étaient fournies par les principales chroniques contemporaines le récit d'un nombre assez considérable d'épisodes ou d'évènements qui se passèrent dans son entourage et que l'on ne trouve pas ailleurs.
Mathieu de COUCY
On sait fort peu de choses touchant la personne de ce chroniqueur, et son nom même est incertain : les uns l'écrivent COUSSY, d'autres COUCY, d'autres ESCOUSSY ou ESCOUCHY. Les seuls renseignements relatifs à sa biographie qui nous soient parvenus résultent de sa chronique. Mathieu nous y apprend qu'il était laïque, natif du Quesnoy-le-Comte, en Hainaut, issu par sa mère de noble génération et originaire de la ville de Péronne, en Vermandois, où il résidait.
Il était né sujet du duc de Bourgogne et compatriote de Enguerrand de Monstrelet (autre chroniqueur) dont il se fit le continuateur.
Il écrivait entre la mort de Charles VII et celle de Philippe le Bon, c'est-à-dire entre 1461 et 1467. Son oeuvre, ainsi qu'il l'annonce, continue immédiatement Monstrelet et poursuit la narration des évènements jusqu'à l'avènement de Louis XI au trône.
Cet extrait de récit forme la matière d'un premier livre, à la fin duquel l'auteur annonce qu'il se propose de reprendre la suite de son travail en composant un second livre. Mais le premier seul nous est parvenu. Le récit de ce chroniqueur est peu étendu, mais il contient des renseignements qui, eux non plus, ne sont pas ailleurs.
Publié le 19/09/2008 à 12:00 par geneapope
Charles VII crée une armée de métier.
L'embryon de la première armée professionnelle rétribuée par le pouvoir en place.
Le roi Charles VII va jeter les bases d'une future armée de métier. On peut s'en faire une idée au travers de textes de certains chroniqueurs du temps :
La réforme militaire de 1439, d'après un poète contemporain :
L'an mil quatre cent trente neuf
Le feu roi si fit les gens d'armes
Vêtir et habiller de neuf,
Car lors étoient en pauvres termes.
Les uns avoient habits usés
Allant par pièces et lambeaux
Et les autres tout déchirés
Ayant bon besoin de nouveau.
Si les monta et artilla,
Le feu roi selon son désir,
Et grandement les rhabilla
Car en cela prenoit plaisir.
(Martial d'Auvergne, "Les vigiles de Charles VII", 1439)
Charles VII réforme l'armée royale - Constitution des compagnies d'ordonnance - 1445 :
L'on doit à Charles VII la constitution de la première armée de métier permanente. L'embryon en est l'établissement des compagnies d'ordonnance, décidé en cette année 1445 par le roi et son Conseil.
Les principaux membres de ce Conseil étaient : son fils, le Dauphin (futur Louis XI), le roi de Sicile, le duc de Calabre son fils, messire Charles d'Anjou, le comte de Richemont, connétable de France, les comtes de Clermont, de Foix, de Saint-Pol, de Tancarville et de Dunois (le Bastard d'Orléans), et d'autres conseillers, tant ecclésiastiques que séculiers.
On décide d'avoir, en divers lieux, des gens d'armes de métier, payés en permanence. Mathieu de Coucy, chroniqueur contemporain, nous en parle :
"... il (le roi)désirait de tout son coeur qu'une bonne ouverture et manière fût trouvée, par laquelle les gens de guerre qui étoient à luy fussent payés et soudoyés en nombre compétent, et mis et assis ès villes et forteresses de sondit royaume, où bon luy sembleroit...
Alors il fut ordonné, tant par le roi que par les dessusdits du Conseil, qu'il y auroit quinze capitaines, lesquels auroient chascun sous eulx cent lances; et que chascune lance seroit comptée à gaiges pour six personnes, dont les trois seroient archers et la quatrième coutillier, avec l'homme d'armes et son page."
On définit la solde et les lieux de cantonnement de cette armée professionnelle permanente, composée de 9.000 hommes environ :
"lequel homme d'armes accompagné, lui sixième, comme dit est, auroit de gaiges pour chascun moys 40 francs, monnoye royale, et seroient mis et distribués par provinces et diocèses, en divers lieux du royaume, par les bonnes villes; et si sauroit un chascun desdits capitaines son lieu et sa retraite, et où luy et ses gens devroient être et avoir leur rendez-vous."
Des gens seront commis dans les lieux de garnison, qui recevraient l'argent pour payer les soldats :
"Outre ce, il fut ordonné qu'ils prendroient et seroient payés de leurs gaiges, tant sur les bonnes villes comme sur le plat pays" (donc en garnison et en opérations)
"et qu'il y auroit certains commis par les bailliages, les sénéchaussées et prévôtés, qui recevroient et payeroient les sommes dessusdites, et en rendroient compte auxdits capitaines en temps et lieu, d'autant que leur charge pourroit monter."
On choisit les capitaines en question, que l'on convoque au Conseil, et à qui l'on enjoint de veiller au recrutement de leurs hommes, et de maintenir une discipline stricte aux lieux où ils seront affectés :
"Lesquels capitaines furent par le roy et les seigneurs du Conseil élus et dénommés, et aussi mandés en la présence du roy; et là leur fut dit et ordonné qu'ils gardassent et entretinssent étroitement, tout autant qu'ils craignaient de tomber dans l'indignation du roy et des seigneurs dessusdits, lesdites ordonnances, et qu'ils ne fissent ne souffrissent être fait par leurs gens aucuns dommages ne violences aux marchands, laboureurs ne autres, de quelque état qu'ils fussent, si cher que ils avoient que iceux dommages fussent retournés sur eux; et prissent tels gens dont ils fussent sûrs et qu'ils en pussent rendre compte."
On précise par écrit aux capitaines les lieux où ils devront prendre garnison, et on équipe les hommes. Puis, ils devront rejoindre les endroits définis, où ils devront remplacer les garnisons de fortune, souvent des gens des seigneurs locaux ou des aventuriers qui devront partir en bon ordre, dans les quinze jours, calmement et sans désordre :
"Tout ce ainsi fait, il leur fut baillé par écrit les lieux où ils devroient aller, et ce qu'ils avoient à faire.
En bref ensuivant après qu'iceux capitaines furent fournis de ce qu'il leur falloit de gens, et qu'ils eurent choisi, à leur pouvoir, sur toutes leurs compagnées, des plus experts et des mieux habillés (équipés), jusques à leur nombre limité, il fut, comme dit est ci-dessus ordonné que tous les autres, c'est assavoir ceux qui n'étoient point gagés, se retirassent hâtivement et sans délai ès pays d'où ils étoient originaires, sans piller ni dérober le pauvre peuple;
Ou autrement, si ainsi ne le faisoient, on y pourvoiroit et en feroit-on justice comme de gens abandonnés et sans aveu.
Et pour mieux y pourvoir, furent envoyés en plusieurs bailliages certains mandements royaux aux officiers servant à ce propos; lesquelles ordonnances et commandements étant venus à la connaissance d'eux, ils s'en allèrent incontinent en plusieurs et divers lieux, et s'épandirent sans s'entretenir par ensemble, tellement que dedans les quinze jours ensuivant on n'entendoit plus aucune nouvelles d'eux dans tous les pays du roy."
Les garnisons se mettent en place, évitant les heurts avec les populations locales, et promettant de réparer avec justice les exactions éventuelles :
"Pour le regard des quinze capitaines dont dessus est faite mention, quand ils furent mis et assis comme dit est ci-dessus (avec) leurs gens, par les provinces, diocèses, bailliages, sénéchaussées et prévôtés du royaume, ils commencèrent à se conduire, gouverner et entretenir par les bonnes villes, très doucement et courtoisement, sans plus faire, ne souffrir être fait par leurs gens, aucune violence ou rigueur aux bourgeois et manants d'icelles, ne aussi aux marchands et laboureurs du plat pays."
"Que si d'aventure il advenoit qu'aucuns d'iceux fissent le contraire, et que la plainte en vint à iceux capitaines, aussitôt et sans délay, ils les faisoient punir et châtier à toute rigueur; et avec ce ils faisoient restituer à ceux qui avoient souffert aucuns dommages, ce qui leur pouvoit avoir été pris."
Les hommes des diverses garnisons sont éclatés en petits détachements. Le nombre de soldats de chacun d'eux varie en fonction du lieu où on les affecte, et l'on surveille leur comportement :
"Or, jà que le nombre des dessusdits gens de guerre ainsi gagés et conservés, comme dit est, se montât environ à neuf ou dix mille chevaux, si étaient-ils par les bonnes villes en assez petit nombre; car il y en avoit à Troyes, Châlons, Reims, Laon ou autres villes semblables, en chacune que vingt, vingt-quatre ou trente, selon la grandeur et la puissance d'icelles; par quoi ils ne pouvoient être assez puissants pour pouvoir prendre aucune maîtrise ni hauteur sur les dessusdits bourgeois ou manants.
Outre quoi, les officiers royaux et les justices ordinaires avoient un singulier regard sur eux et sur leurs comportements, pour observer s'ils ne commettroient point quelques fautes, de la punition desquelles leurs capitaines n'en fissent pas bien leur devoir."
Les hommes sont passés en revue périodiquement, et l'on pourvoit au remplacement des défaillants :
"D'autre part, il y avoit certains commis de par le roy, qui les voyoient en leurs habillements passer aux monstres assez souvent, afin qu'ils s'entretinssent comme il appartenoit, sans vendre ni perdre leurs chevaux et harnais; et, quand il défailloit quelqu'un d'eux par mort ou autrement, aussitôt un autre étoit mis et substitué en son lieu."
De manière spontanée, une réserve de volontaires se crée, dans laquelle les capitaines peuvent puiser si le besoin s'en fait sentir :
"Même il y en avoit plusieurs qui, à leurs dépens, suivoient assez longuement les capitaines, sur l'espérance de parvenir à leur rang et d'y être enrôlés, quand le cas adviendroit; et encore leur falloit-il souvent rechercher, par grands moyens et notables recommandations, d'y être admis.
Que s'il advenoit qu'il survint au Roy aucunes affaires, en quelque lieu que ce fût en son royaume, il envoyoit tout aussitôt aucuns de ses messagers devers lesdits capitaines, ou aucuns d'iceux; et incontinent, sans aucun délay, en peu de jours ils tiroient et se rendroient devers luy, ou ès lieux où il les vouloit : par ainsi, se trouvoit-il pourvu de bon nombre de combattants, et bien en point, assez soudainement, avec l'aide de ses princes, de sa chevalerie et de sa noblesse."
(Mathieu de Coucy, "Chroniques", ch. VI)
Comment l'armée de Charles VII était composée en 1450 - L'artillerie royale :
Un autre chroniqueur contemporain nous donne une idée de ce qu'était alors l'armée royale, qui se transforme, et à laquelle on a ajouté l'artillerie :
"Parce que ci-dessus est assez parlé des assemblées des gens d'armes que les princes et les seigneurs tenoient et avoient et comment l'un avoit deux cent lances, l'autre trois cents et ainsi plus ou moins, il est bon de faire entendre ce qu'on appeloit une lance et quelle suite elle avoit.
Il est vrai que par l'ordonnance que le roy avoit mise en son royaume et sans compter les seigneurs fieffés et arrière-fieffés qui devoient servir, il y avoit dix-sept cents lances. Ceux qui étoient de cette ordonnance de dix-sept cents lances, de mois en mois, soit que le roy eût guerre ou non, les gens du plat pays et des bonnes villes les payoient par une taille que ce roy avoit mise, laquelle on appeloit la taille des gens d'armes.
Et avoit chaque homme d'armes quinze francs, monnaie royale, pour ses trois chevaux, à savoir pour luy, son page et son guisarmier, (*)
ou coutillier; et chaque archer pour luy et son cheval sept francs et demi le mois.
Durant la conquête de Normandie, tous les gens d'armes du roy de France qui étoient à son service, fût-ce de cette ordonnance ou non, furent tous payés de leurs gages de mois en mois. Et il n'y avoit si hardi qui osât devant ladite guerre ou conquête de Normandie, prandre prisonnier, ni ranconner cheval ni autre bête quelle qu'elle fût, vivre en aucun lieu sans payer excepté seulement sur les Anglois et gens tenant de ce parti."
"Tous ceux pareillement qui gouvernoient l'artillerie étoient payés de jour en jour; en laquelle artillerie il y avoit le plus grand nombre de grosses bombardes, gros canons, serpentines, crapaudaux, couleuvrines, le tout bien garni de poudre, manteaux et autres choses pour approcher et prendre villes et châteaux; et moult grand'foison de charrois pour les mener et des maneuvriers pour les gouverner."
"Etoient commis à l'artillerie messire Jehan Bureau et son frère, qui en faisoient moult bien le devoir. Et à dire la vérité, durant cette conquête de Normandie, un plus grand nombre de villes et de châteaux eussent été pris d'assaut et par force d'armes; mais, quand les places étoient approchées et prêtes à être assaillies, le roy de France, Charles, en avoit pitié et vouloit qu'on les prit par composition pour obvier à l'effusion du sang humain et à la destruction du pays et des peuples."
(Mémoires de Jacques du Clercq, liv. I, ch. VIII)
(*) soldat qui portait une guisarme, ou hache à deux tranchants.
Donc, en 1445 :
Une lance =
- 1 homme d'armes,
- 1 page,
- 1 coutillier (ou guisarmier),
- 3 archers,
soit 6 hommes, à 40 francs pour la totalité de la lance.
Chaque capitaine commande donc 600 hommes.
Avec les 15 capitaines, cela représente 9.000 hommes.
C'est la première armée de métier, embauchée en permanence, et rétribuée par le pouvoir en place, c'est-à-dire le roi, grâce à une taille (impôt) levé sur les lieux de garnison.
C'est l'embryon de notre armée moderne, avec 1.500 hommes d'armes, 3.000 pages et coutilliers, et 4.500 archers.
En 1450, cette armée fut portée à 1.700 lances, ce qui donne, par le même calcul : 10.200 hommes, auxquels on pouvait rajouter, le cas échéant, les troupes de certains seigneurs "fieffés" (titulaires d'un fief) qui avaient encore le droit de lever leurs propres hommes d'armes.
A cela, il faut aussi rajouter les deux compagnies de garde écossais, environ 200 hommes, plus particulièrement chargés de la sécurité de la personne du roi.
On pouvait aussi compter sur les milices municipales.
Ainsi furent jetées les bases de notre armée moderne, première armée de métier.
nb :
Il existait aussi dans les villes un service de guet, qui était chargé de surveiller les alentours du haut des tours ou des remparts.
A titre d'anecdote, voici comment était composée le "guet" d'Orléans, en mars 1566, avec le nombre d'hommes et les paies correspondances :
- 1 chevalier (ou écuyer) : 1.200 livres par an
- 1 lieutenant : 250 livres par an
- 8 archers à 100 livres : 800 livres par an
- 22 archers à 50 livres : 1.100 livres par an
- 1 greffier : 150 livres par an,
soit 33 hommes, et une dépense, pour la ville, de 3.500 livres par an.
En juillet 1563, est nommé pour commander ce corps, Roland de Sémellon, écuyer, homme d'armes de la compagnie de M. de Cypierre, gouverneur de la ville.